Pourquoi les surdoués portent un masque ?

Le faux-self est un mécanisme d’adaptation qui consiste à modifier son comportement et s’éloigner temporairement de « son vrai moi » pour s’adapter à une situation. Bien qu’il soit nécessaire, les conséquences d’un excès de faux-self peuvent être dévastatrices surtout pour les Hauts Potentiels. En effet, l’incompréhension de leur fonctionnement les amène souvent à se sur-adapter pour se fondre dans la masse et passer inaperçu (groupe, travail, famille, couple…), s’éloignant de ce qu’ils sont vraiment. Le faux-self devient omniprésent et une sensation d’imposture et de vide envahit petit à petit leur quotidien.

Après avoir lu cet article, tu seras capable de :

  • Reconnaître et différencier self et faux-self,
  • Comprendre leurs implications sur le quotidien des hauts potentiels,
  • Savoir comment ton faux-self s’exprime et comment te reconnecter à toi-même en 3 exercices simples.

Que sont le self et le faux self ?


Le self ou « vrai-self »


Le self fait référence à un fonctionnement prenant racine dans l’enfance. En effet, au début de la vie, le nouveau né n’a pas conscience de son individualité. Il se ressent comme un « prolongement » des parents, plus particulièrement de la mère. Puis au fur et à mesure qu’il grandit, il va commencer à construire son identité à travers ce que lui renvoie son entourage, son environnement. Lorsque l’enfant grandit dans un environnement sécurisant, l’image qu’il va avoir de lui sera quasiment la même que celle qu’il renverra aux autres. Il est proche de son « vrai » moi, ce qu’il est vraiment, et est accepté et agit en tant que tel. C’est ce qu’on appelle le self ou « vrai-self ». On peut aussi le comparer à la personnalité : ce que je suis et la façon dont je me définis.

Le faux-self, mécanisme d’adaptation


Cependant, tu le sais, nous ne pouvons pas toujours réagir « sans filtre ». La vie collective impose un certain nombre de règles dès le plus jeune âge. C’est pour s’adapter à ces situations que le faux-self apparaît.

Cette notion de faux-self est due au pédiatre, psychiatre et psychanalyste britannique Donald WINNICOTT. Le faux-self, c’est adapter l’image que l’on renvoie de soi. « Ne plus être vraiment moi » temporairement pour m’adapter à une situation. Nous l’utilisons tous les jours à travers la politesse, les bonnes manières… En soi, nous avons besoin de faux-self, tant qu’il n’empêche pas l’expression et le développement de la personnalité.

Apparition du faux-self


La première étape du faux-self apparaît lorsque, pour diverses raisons, l’enfant perd sa spontanéité à se montrer tel qu’il est. Cela peut être lié à l’éducation parentale, scolaire, à un rapport conflictuel avec son environnement… Mais quand cette perte de spontanéité devient répétitive, le faux-self devient de plus en plus dominant. Bien souvent dans le but de protéger le self (ou le « vrai moi ») qui se retrouve fragilisé. Si par exemple « être soi » peut conduire à un rejet, cette façon d’être est fragilisante et l’individu utilise le faux-self pour s’adapter et éviter d’être rejeté.

Le rapport entre ces deux self évolue pendant toute la vie avec différents degrés. Le faux-self est nécessaire tant que le « vrai-self » est facilement mobilisable. Le problème se pose lorsque cela commence à ne plus être le cas.

Comme nous l’avons vu précédemment, le faux-self est un mécanisme de défense qui permet d’adapter sa personnalité à une contrainte. Un exemple de faux-self serait de prétendre s’intéresser à un sujet qui nous ennuie pour nous intégrer plus facilement dans un groupe. C’est « porter un masque », se donner une image qui n’est pas la nôtre. Chez le surdoué, le faux-self peut être particulièrement dévastateur. Mais qu’est-ce qui le pousse à ne plus être lui même ?

Surdoué et faux-self


Le fonctionnement qualitatif du surdoué, sa vitesse de raisonnement et les particularités de son cerveau l’amène à avoir un comportement différent de celui du groupe tout en devant lui ressembler. Ce paradoxe fait naître en lui un sentiment de mal-être lié au fait de jamais réellement pouvoir être lui-même. Pire encore, il l’éloigne de sa vraie personnalité semant confusion et discorde. L’adulte ou l’enfant surdoué ne sait plus faire la différence entre le rôle qu’il joue et ce qu’il est vraiment.

Parallèlement, lorsque les parents ont du mal à comprendre les besoins spécifiques de ces enfants précoces, ils peuvent maladroitement leur demander une adaptation excessive. L’enfant ne voulant pas être rejeté, va s’adapter au détriment du développement de sa propre personnalité.

Conséquences du faux-self excessif chez le surdoué


Lorsque le faux-self prend trop de place, les conséquences peuvent être assez graves. Surtout chez le Haut Potentiel qui s’adapte déjà constamment à une société qui ne lui ressemble pas.

L’environnement professionnel dans la plupart des cas cherche à écraser toute « sortie de rang ». Une façon de fonctionner « à contre courant » sera au mieux interprétée comme une bizarrerie, au pire comme un déséquilibre psychique. Quant au milieu scolaire, un enfant qui ne s’intéresse pas à ce qu’on essaye de lui enseigner est forcément un enfant insolent ou qui n’a pas le niveau attendu. Toutes ces pressions poussent l’enfant ou l’adulte surdoué à jouer un rôle pour survivre socialement, professionnellement…La conséquence directe est ce qu’on appelle en psychologie sociale la dissonance cognitive. C’est un état de tension lorsque le comportement entre en contradiction avec les idées. Les conséquences à plus long terme sont nombreuses : conflit ou crise identitaire, dépression, culpabilité, perte durable de l’estime de soi… A force de jouer un rôle, on s’éloigne tellement de qui on est que l’on arrive un jour à ne plus se souvenir de notre « vraie » personnalité.

L’utilité de bien se connaître


Parallèlement, une sensation d’imposture, de vide et de profonde solitude devient de plus en plus présente et empoisonne le quotidien petit à petit. Indirectement, c’est une plongée en avant vers le burn-out, la dépression… Comment savoir se protéger si l’on ne se connait pas ? Si l’on ne sait pas ou plus qui l’on est ? Être trop dans le faux-self, c’est ne même plus avoir conscience de ses propres besoins, donc comment les satisfaire ?

Je suis persuadé que la facilité d’adaptation du haut potentiel est une vraie force, mais c’est aussi une des ses plus grandes faiblesses lorsqu’elle n’est pas bien comprise. Fort heureusement, c’est une caractéristique qui se travaille. On peut apprendre à se connaître, à se protéger et à utiliser astucieusement son faux-self.

Se reconnecter à soi-même ?


Quel est ton « vrai-self » ?


Bien se connaître n’est pas seulement nécessaire, c’est primordial. La première étape est donc de dresser ton portrait. C’est un exercice qui va te demander de te poser et prendre du recul.

Qui es-tu vraiment ? Quelles sont tes forces ? Les choses qui te mettent en difficulté ? Tes aspirations et tes valeurs ? Les passions que tu as ? Qu’as-tu réussi à faire dans ta vie ? Comment y es-tu arrivé ? Évite par exemple les « je suis une personne anxieuse ». C’est UNE façon de raconter qui tu es, mais c’est aussi ce qui t’empêche d’évoluer. Préfére la formulation « je traverse une période d’anxiété ».

Met le sur papier pour pouvoir le relire régulièrement. Comme je le répète souvent en coaching, ce n’est pas l’intensité qui compte mais la régularité. Relire ce mémo sur toi-même 5 min par jour pendant que tu te brosses les dents sera amplement suffisant tant que c’est tous les jours. Essaye d’être le plus empathique et le plus précis possible. Ce petit exercice vise à te donner une image positive de ce que tu es, pas t’enfermer dans des schémas et descriptions réductrices.

Comment s’exprime ton faux-self ?


Lorsque tu auras réussi à mettre cela en place, tu vas analyser ce qui se passe autour de toi. A chaque fois que tu seras en interaction avec les autres, tu vas te poser la série de questions suivante :

  • Est-ce que j’agis naturellement ou est-ce que je joue un rôle ?
  • Si je joue un rôle, pourquoi est-ce que je le fais ?
  • Est-ce que cette situation me satisfait ou est-ce que je n’en veux plus ?
  • Comment est-ce que je pourrais faire en sorte d’être moi dans cette situation ?
  • Qu’est-ce que cela changerait ?

Ce second petit exercice va te permettre de faire émerger un certain nombre d’idées, de pistes auxquelles tu n’avais peut-être pas pensé. Peut-être qu’il va te permettre de prendre conscience de certains schémas néfastes de ton quotidien. Encore une fois, le mettre sur papier permet de le « sortir de toi » et prendre de la hauteur. C’est grâce à ces informations que tu vas pouvoir faire le troisième et dernier exercice.

Quels sont tes besoins ?


Tu as dressé un portrait empathique et sincère de toi, puis tu t’es posé un certain nombre de questions sur les interactions avec ton quotidien. Maintenant, tu vas sans doute avoir remarqué des choses qui te dérangent ! C’est à ce moment que l’on va passer à une action un peu plus concrète.

Grâce à ces réponses, tu vas pouvoir effectuer ce dernier exercice :

faux-self surdoué méthode

Comme indiqué dans le tableau, tu vas classer dans les case 1, 2, 3 et 4 différentes informations. En case 1, il s’agira de ce que tu veux et sur quoi tu peux agir. En case 2 ce que tu ne veux plus et sur quoi tu peux agir et ainsi de suite…

Comment utiliser ces informations ?


Une fois le tableau rempli, nous allons nous intéresser particulièrement aux cases 1 et 2. La première case correspond à ce que tu vas mettre en place pour toi. C’est le premier pas vers la satisfaction de tes propres besoins, et pas ceux des autres. Tu as le pouvoir d’aller vers ce dont tu as besoin, alors utilise le ! La seconde case correspond quant à elle à ce qui te dérange dans ta vie et sur quoi tu as une action. Toute cette case représente les petites choses qui te pourrissent la vie. Maintenant que tu les as identifiées, renvoie les d’où elles viennent !

Tu vas inscrire ces éléments sur une page blanche et les rayer au fur et à mesure de leur élimination ou intégration dans ta vie. Cet exercice peut paraître très simple, mais il est aussi très puissant. Il ne réglera pas tous tes problèmes en un clin d’œil, mais il te mettra sur une voie positive pour te réapproprier ta vie.

Voilà ! Avec ces trois exercices, tu es déjà en mesure d’identifier les sources de conflit dans ton quotidien et de commencer à aller vers ce que tu es vraiment.

  • renan dit :

    Bonjour,

    Du coup, je me demande comment je peux m aider dans un premier temps, et dans un deuxième, comment aider les autres?

    • Florian BIGEY - Coaching Zèbre dit :

      Bonjour Renan,

      Pour savoir comment aider les autres c’est très simple. Aide toi toi-même car on emmène les gens là où on a réussi à s’emmener soi même.

      Te concernant tu me demandes comment est-ce que tu peux t’aider. Quel est le problème que tu rencontres ?

      A bientôt,

      Florian

  • Alexiane dit :

    J ai l impression de lire une description de moi même…Cette façon de faire le caméléon en permanence et toutes les conséquences que ça provoque…Un véritable enfer ! Il est temps que je fasse ces exercices pour me sortir de là!

    • Florian BIGEY - Coaching Zèbre dit :

      Hello Alexiane !
      Je suis super content si ça te parle 😉
      Tu nous tiens au courant de ce que t’ont apporté les exercices ?
      A bientôt !

  • cathy dit :

    Les larmes me viennent en lisant cela. Mon hypersensibilité certainement couplée au fait que ce portrait me décrive parfaitement.. je je travaille beaucoup car ultra impliquée dès que je retrouve l’équation intégrant : utilité, sens et valeurs, bienveillance, reconnaissance des compétences… je carbure…
    Bref aujourd’hui je finalise un master recherche (dans 3 jours) pour réaliser une thèse… et je rentre dans un monde que je ne reconnais pas…. l’adaptation au système est frustrante pour moi, elle me,fait perdre du temps là où j’aimerai aller plus,vte….elle m’épuise, me fatigue et me fait procrastiner…
    Bref dissonance, je confirme craquage complet… j’abandonne ce système qui m’enmènerait à coup sûr au burnout. J’ai appris à connaitre mes limites, il faut vite que j’arrête pour rester positive et ne pas sombrer…

    Ça y est je suis en accord avec mes choix 😊

    Merci pour se post ❤

    • Florian BIGEY dit :

      Bonjour Cathy,

      Super témoignage, merci pour le partage ! Effectivement c’est difficile de trouver ses limites et respecter ses besoins dans ce monde mais tu prends un chemin tout à fait honorable.

      Très heureux que le post te plaise et à bientôt !

  • Axel dit :

    Bonjour et merci pour ce post éclairant !
    Moi aussi je me reconnais… sauf que… j’ai tellement l’habitude de m’adapter depuis tout petit que je suis même incapable de faire le 1er exo… Qui je suis ? Aucune idée : ce que les autres veulent que je sois…
    Au-delà et lorsque j’arrive à identifier un fonctionnement auquel je me contrains et qui me pourrit la vie, je ne vois pas comment je pourrais m’en débarrasser car il est le résultat d’une adaptation. Dit autrement, si je le change je ne suis plus adapté, et si je ne suis plus adapté cela a de bonnes chances de mal se passer. Dans le monde professionnel, quand tu n’es pas adapté, tu es en échec. Or on a tous besoin de manger…
    Est-ce que tu aurais des pistes sur ces 2 problèmes ?

    • Florian BIGEY dit :

      Bonjour Axel !

      Les deux ne sont pas incompatibles ! Il s’agit de trouver un juste milieu. Dans tous les cas, s’adapter pour plaire aux autres n’attire que des déceptions car lorsque tu décides de changer on te rejette car ce n’est pas comme ça qu’on te connaît.

      Professionnellement parlant, il existe des endroits où on peut t’accepter tel que tu es. Le HP est une vrai richesse et certains employeurs le savent 🙂

      Merci pour ton retour et à bientôt !

  • Armelle dit :

    Bonjour. Merci pour ce post impressionnant de pertinence et de synthèse. Du concentré !!! Je viens très récemment (fin Dec 19) de recevoir officiellement le HPI WAIS IV award :-). Je plaisante, mais à 56 ans je rencontre de telles difficultés professionnelles depuis que je suis dans mon entreprise actuelle (9 ans, ces 2 dernières années en particulier), que j’en suis arrivée à des pensées suicidaires. Le résultat du test HPI que j’avais engagé en parallèle m’a surtout rassurée et fortement motivée à ne plus me remettre à 200% en cause dans mon environnement pro de faible maturité. Votre post est très riche et semble de donner énormément d’outils pour m’aider à inverser le problème et m’aider dans ma démarche pour quitter mon environnement pro très toxique.
    Tout est très clair. Pour l’instant, à moi de faire le travail à partir des exercices. Chaque chose en son temps. Alors…… MERCI

    • Florian BIGEY dit :

      Bonjour Armelle !

      Merci pour ce retour qui fait chaud au cœur et bravo pour votre détermination ! Tenez nous au courant pour la suite et à bientôt

  • Jérôme dit :

    Concis, précis… Une description de moi. De nous, à la lecture de tous ces commentaires… Je vais avoir 38 ans et je me découvre seulement, violemment… C’est ma femme qui a trouvé votre article, suite à une grosse discussion que nous venons d’avoir, à la suite d’une thérapie que j’ai entreprise avec un spécialiste des HPI.
    Je n’y crois toujours pas… Le 1er exercice est déjà insurmontable. Mais votre article a au moins réussi à expliquer à ma compagne là où j’ai peut être disgressé. Alors merci.
    Je crains les conséquences de mon réveil tardif pour mon entourage familial proche…

    • Florian BIGEY dit :

      Bonjour Jérôme,
      Merci infiniment pour votre retour. Je suis ravi que mon article ait pu vous être utile.
      Gardez espoir, il n’y a que la transformation qui compte et elle n’est jamais trop tardive. Vous ne pouvez pas vous culpabiliser à propos de choses dont vous n’étiez pas encore conscient 🙂
      Bon courage dans votre avancée et à bientôt sur ce blog!

  • Prisca dit :

    Il m’est aussi difficile de me décrire.En effet,dans ma société on joue tous un role. On ne te donne pas le droit de te tromper et de mal agir (tu risques des coups).Dans ce cas on porte constamment un masque dont il est difficile de se défaire.Je me suis perdue

    • Florian BIGEY dit :

      Bonjour Prisca,
      Peut être qu’il pourrait être opportun de se demander si l’endroit dont vous parlez mérite vraiment tous ces efforts et ajustements de votre part ?
      La résistance mène presque toujours a la souffrance, donc parfois il est plus judicieux de simplement accepter qu’on est pas a notre place et qu’on mérite mieux.
      Belle journée

  • >
    Retour en haut